Transcription du texte de la vidéo : Tous droits réservés.Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article______________________________________________________________Bonjour,
Nous poursuivons notre lecture du ch. 12 du Dt, à partir du v. 4 qui surprend à son tour dans la mesure où, à bien y regarder, on pourrait en fait passer sans difficulté directement du v. 3 au v. 5 :
« Pour mener à perte, vous mènerez à perte tous les lieux où les nations dont vous héritez ont servi leurs ‘ÈLoHîM, sur les Hauts Monts, sur les collines et sous tout arbre luxuriant. Abattez leurs autels, brisez leurs stèles, calcinez leurs ‘AShéRâH ! [v. 4] Mais le lieu qu’aura élu YHWH, votre ‘ÈLoHîM, d’entre tous vos rameaux — vos tribus —
pour y mettre son Nom pour l’y faire demeurer, vous le rechercherez ! C’est là que tu viendras ! » (Dt 12,3.5). Que dit le v. 4 ?
« Vous ne ferez pas ainsi envers YHWH, votre ‘ÈLoHîM. » (Dt 12,4).
Alors pour comprendre, faisons encore une fois rapidement mémoire de l’histoire factuelle — on ne perd jamais son temps à revenir sur ces points d’appuis historiques pour mieux comprendre la TORâH : on avait, avant l’invasion assyrienne et jusqu’à Sennachérib, à tout le moins des dizaines de sanctuaires voués à la divinité YHWH, répartis non seulement sur les territoires des royaumes de YiSs
eRâ‘éL et de Y
eHOuDâH, mais aussi tout autour : en MaDiâN, au Sud ; en ‘ÉDoM à l’Est ; etc. Ce n’est qu’après l’invasion sauvage de l’Assyrie et sa politique d’éradication systématique de tous les lieux de cultes des pays conquis — de quelque obédience que ce soit : YaHWéH, ‘AShéRaH ou Bâ“aL pour les plus connus — Ce n’est donc qu’après l’invasion sauvage de l’Assyrie que Y
eROuShâLaYiM se retrouve en situation de monopole du culte de YHWH. Reste que c’est une secousse majeure qui, comme toute secousse, demande d’être INTERPRÉTÉE, mise en mots, pour être gérée — et ça rappelons-nous : c’est le génie des scribes Juifs que de l’avoir saisi ! Ça aussi relève de l’inspiration ! Cet exercice est d’autant important que les populations qui viennent trouver refuge à Y
eROuShâLaYiM — celle qu’on appellera plus tard les fameuses “tribus” de YiSs
eRâ‘éL — sont assez disparates ! Il va donc falloir faire en sorte que ce regroupement puisse être unifié efficacement.
Plus tard, au moment de l’Exil, la saga de Moïse va servir de trame narrative pour que la TORâH, dont nous assistons dans nos versets à la naissance, s’adosse peu à peu à une histoire. La chose est essentielle parce que n’est qu’alors qu’elle pourra se TRANSMETTRE et façonner l’âme de ce peuple nouveau : TOUT YiSs
eRâ‘éL, c’est-à-dire, rappelons-nous toujours : non seulement l’ensemble des tribus qui le constituent désormais, mais tout autant l’ensemble des générations qui le composeront au fil du temps.
En substance, le message est donc celui-ci : « Nous voilà regroupés autour du dernier sanctuaire de YHWH ! C’est donc là, dans cet ÉVÉNEMENT, que se révèle pour nous son projet éternel : être adoré LÀ, en CE LIEU-CI — HaMMâQOM HaZZèH,
הַזֶּה הַמָּק֞וֹם comme disent les rabbins pour désigner ce site contre lequel, visiblement, aucune nation ne peut rien — pensons ici à Sennachérib ! Mieux : rassemblés par YHWH en personne sur le LIEU qu’Il a élu, YiSs
eRâ‘éL se reconnaît par conséquent lui-même comme le peuple élu de YHWH.
Dès lors, en INTERPRÉTANT cet ÉVÉNEMENT, les scribes vont discerner rétrospectivement des signes précurseurs de cette élection. Pour eux, YHWH n’a pas choisi ce lieu à partir de Sennachérib, qui n’a été qu’une petite main dans cette affaire ! En réalité — et c’est là le magnifique travail des rédacteurs —, qui a choisi ce site pour l’établir comme capitale ? C’est DâWiD, le premier roi de TOUT YiSs
eRâ’éL — avant le schisme, le second livre des Rois nous raconte comment il a fédéré les clans qui composeront plus tard TOUT YiSs
eRâ’éL ! Ce faisant, comme ce choix est confirmé par YHWH à la fin du viii
e siècle sous H.iZ
eQiYYâHOu / Ézéchias, c’est que DâWiD a été inspiré par YHWH qui livrait là, dès le x
e siècle, mais secrètement, un signe de l’élection divine de ce lieu.
Mais encore : si cette élection de Y
eROuShâLaYiM touche à la nature profonde de YiSs
eRâ’éL, il faut encore en trouver traces dès l’époque des patriarches. Et c’est ainsi que la tradition orale va travailler à en reconnaître les signes dès l’époque patriarcale. Pour la tradition orale — la TORâH Sh
eBè“âL PèH, indissociable de la TORâH écrite, la TORâH Sh
eViKh
eTaW — YHWH a montré en vision CE LIEU-CI à Moïse, lorsqu’il était dans la Nuée sur le mont H.oRéV ; et à Jacob avant lui, notamment dans le songe de BéYT-’ÉL ; et à Abraham encore avant lui au moment de la ligature de YiTs
eRâQ… Et vous vous souvenez peut-être que les commentateurs de la TORâH remontent ainsi jusqu’à la Création pour affirmer qu’elle a commencé à partir de CE LIEU-CI ! Je n’y reviens pas.
Maintenant, posons-nous une question délicate : où est la vérité là-dedans ? Est-ce que cette manière d’établir des signes précurseurs ne ressortirait pas, dans le fond, d’une simple propagande idéologique ? Eh bien pas forcément !
Ce serait le cas s’il s’agissait d’imposer une hégémonie, de motiver le peuple pour conquérir le monde à la manière des nations assyrienne, babylonienne ou autre ; on aurait là un récit militant chargé de consoler YiSs
eRâ’éL de son humiliation en suscitant en lui un désir de revanche, pour ne pas dire de vengeance… « Le peuple élu, c’est nous ! Et vous allez voir ce que vous allez voir ! » Sauf que la considération du LIEU ÉLU, choisi par YHWH, et en conséquence du peuple élu. Cette considération n’est pas là pour exalter l’orgueil du peuple ; elle est élaborée pour mettre TOUT YiSs
eRâ’éL EN TRAVAIL SUR LUI-MÊME à partir de l’ALLIANCE, de l’ENTRE-DEUX avec YHWH, et là, c’est tout
différent ! C’est un TRAVAIL assez enthousiasmant qui exalte avant tout la vertu de MAGNANIMITÉ — la grandeur d’âme, la conscience d’un devoir d’élévation vers une liberté intérieure porteuse de vie —. Mais pour que cette MAGNANIMITÉ ne se transforme pas en orgueil, lui est d’emblée associée l’HUMILITÉ : Rappelons-nous :
« Tu es le moindre de tous les peuples !… », lançait Moïse au peuple au ch. 7 du Deutéronome. Et le prophète Y
eSha“
eYâHOu / Isaïe —
יְשַׁעְיָהוּ — va encore plus loin : du cœur de l’ENTRE-DEUX qui attache YiSs
eRâ’éL à YHWH par la TORâH, le peuple va apprendre à assumer le statut de SERVITEUR de YHWH, haï par les nations !!! Pas si simple ! Sachant ça, si c’est pour en passer par là, qui a encore envie de défier YiSs
eRâ’éL pour prendre son leadership ? On ne peut donc pas dire que la TORâH relève de la propagande. Elle relève bien plus sûrement d’un TRAVAIL SPIRITUEL d’élévation intérieure, proposée à un PEUPLE tout entier. Que je sache, on ne trouve AUCUNE littérature équivalente ailleurs !
Du coup, on voit peut-être plus clairement à quel point l’interprétation de TOUTE l’histoire qui s’est déroulée du côté Ouest du Jourdain, en KaNa“aN, reçoit vraiment ses fondements dans nos versets : pourquoi CE LIEU-CI, HaMMâQOM HaZZèH, est-il si important ? Pourquoi nous battons-nous ? À quel APPEL répondons-nous ? Quel est cet ENTRE-DEUX qui nous montre ce chemin ? Or ce sera précisément le rôle de la TORâH que de déchiffrer cette histoire comme une longue et patiente RÉPONSE de TOUT YiSs
eRâ‘éL à l’APPEL premier de YHWH :
« Vous ne ferez pas ainsi envers YHWH, votre ‘ÈLoHîM. — c’est-à-dire il ne faut pas chercher à le détruire, tout au contraire : —
Le lieu qu’aura élu YHWH, votre ‘ÈLoHîM, vous le rechercherez ! » Alors entendons bien : dans la mesure où cette injonction appartient à la TORâH, cet APPEL est lancé à TOUTES LES GÉNÉRATIONS qui composent TOUT YiSs
eRâ‘éL ! Pas seulement les générations du désert. C’est à CHAQUE GÉNÉRATION juive de s’attacher à ce lieu-ci et à faire en sorte que les grandes fêtes soient le signe de l’UNITÉ TEMPORELLE, historique, de TOUT YiSs
eRâ’éL.
On comprend mieux alors le trouble que provoque Jésus lorsqu’il dit :
« Détruisez ce Temple et en trois jours je le relèverai. Il parlait du sanctuaire de son corps. » (Jn 2,19.21). C’est comme s’il leur disait : « Même ce lieu-là, vous pouvez le détruire comme les autres, parce que Le LIEU qu’a choisi le Père depuis la fondation du monde, c’est mon Corps ! » Le moins qu’on puisse dire, c’est que ça n’a rien de neutre ! Encore que, SUR LE COUP, ses interlocuteurs, disciples compris, sont loin de savoir interpréter de telles paroles ! Ce n’est qu’APRÈS COUP qu’ils ont discerné dans ces paroles un signe précurseur de la résurrection :
« Aussi, quand il se réveilla d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ; ils eurent foi en l’Écriture — entendez : la TORâH —
et à la parole que Jésus avait dite. » (Jn 2,22). Vous voyez ? SUR LE COUP, ils ne comprennent rien, puisque la Résurrection n’a pas encore eu lieu ; mais APRÈS COUP, à partir de l’ÉVÉNEMENT de la Résurrection, ils vont revisiter la mémoire des fondements, la mémoire des APPELS de l’Écriture, à la lumière de quoi ils discernent que le Christ est, dans son CORPS ressuscité, le HaMMâQOM HaZZèH de YHWH ; le LIEU ultime en qui YHWH a choisi de demeurer dès la fondation du monde ; ce CORPS en qui est offert LE seul SACRIFICE qui puisse être agréé par Lui pour la rédemption de tous les hommes… C’est assez gigantesque !
Mais revenons à nos versets : la TORâH relie donc entre elles chaque saga des patriarches, de Moïse, Josué et Samuel pour l’entendre comme une vaste QUÊTE DE CE LIEU-CI — de Y
eROuShâLaYiM ; avec ses moments glorieux et ses moments pathétiques ; ses victoires et ses défaites ; ses illuminations et ses balourdises ; ses élans vers YHWH et ses compromissions avec les idoles, etc. Mais quoi qu’il en soit, à travers cette quête, la TORâH offre au peuple, à chaque épreuve, des raisons de se relever ; des raisons d’espérer et de développer une aptitude à savoir discerner un à-venir à chaque impasse qui se présente. Les scribes, inspirés n’en doutons pas, offrent donc au peuple le moyen de revisiter les récits fondateurs, de se greffer sur la quête qui les animait à l’APPEL de YHWH et puiser dans ces récits et les lois qui les accompagnent l’assurance d’être BÉNIS. Or où écouter ces récits ? Principalement à l’occasion des grandes fêtes que le peuple va chercher à célébrer préférentiellement en CE LIEU pour se sentir appartenir à un seul CORPS et goûter à travers lui la puissance de la VIE plus forte que les puissances de MORT. C’est tout ça qui compose le chemin, l’âme, la QUÊTE de TOUT YiSs
eRâ‘éL dont l’appel formel retentit ici, dans ces v. 4-5. Aujourd’hui encore d’ailleurs, à la fin de la fête de PèSaH., ou à SouKOT, les Juifs n’oublient jamais de lancer : « L’an prochain à Y
eROuShâLaYiM ! », L
eShâNâ HaBâ‘âH BiY
eROuShâLaYiM ,
לְשָׁנָה הַבָּאָה בִּירוּשָׁלַיִם.
Alors maintenant, le texte ne parle pas de chercher ce lieu avec une baguette de sourcier, ni que YHWH le désigne du doigt en enjoignant le peuple d’obtempérer façon mythe coranique concernant la Kaaba : « Tu viendras LÀ ! » ! Non ! la TORâH n’a rien du manifeste d’un “nouvel ordre” idéologique qui imposerait l’élection de YiSs
eRâ’éL à toutes nations au nom d’une “vérité” prétendument absolue. C’est d’ailleurs à cette prétention qu’on reconnaît une idéologie : vous avec UNE idée, et tout à coup, à partir de ce qu’elle peut contenir de pertinent, vous décrétez qu’elle est universelle et totalisante ! Ça s’appelle en philosophie « prendre une idée pour le tout », ce qui est évidemment complètement réducteur et assassin à court terme : pour l’idéologue, tous ceux qui ne passent pas par le petit bout de sa lorgnette idéologique doivent être éliminés. Ce qu’on appelle la « pensée unique », qui est le lot des despotismes. Le chemin qu’ouvre YHWH ne relève en aucun cas d’un tel aveuglement meurtrier.
Du coup, au regard de la TORâH, briser les idoles consiste avant tout à donner à YiSs
eRâ’éL les moyens de NE PAS devenir idéologue ! Autrement dit de ne pas prendre une idée, une IDOLE, pour une divinité. Briser les autels de Bâ“aL, c’est refuser de pervertir le chemin que dessine l’ENTRE-DEUX avec YHWH en remplaçant l’un des termes — YHWH en l’occurrence — par une idole, ce qui est remarquablement synthétisé dans l’épisode du Veau d’Or, dans le livre de l’Exode — donc dans la TORâH : il s’agit d’un texte fondateur ! —. Le problème, c’est que si on comprend que l’idole n’est jamais la projection divinisée des fantasmes humains de pouvoir, la choisir pour remplacer YHWH revient à supprimer l’un des termes de cet ENTRE-DEUX fondateur pour le remplacer par… RIEN : ni Dieu, ni Maître, puisque l’idole, en dernier recours, c’est une image de MOI, de mon narcissisme hypertrophié ! Du coup, l’homme tourne sur lui-même ; il fait du sur-place faute de bénéficier de cet espace créé par l’ENTRE-DEUX, qui est pourtant le seul moyen pour que se trace un chemin de SORTIE DE SOI ; un chemin de LIBÉRATION DE SOI ! Se tourner vers l’idole, ce n’est jamais qu’aller de soi-même à soi-même, et c’est mourir en s’enfer-mant sur soi, en devenant l’esclave de soi-même tout en ayant la certitude d’être son propre maître… c’est pathétique…
Donc, en contrecarrant toute tentation de réduire à néant l’ENTRE-DEUX avec YHWH, la TORâH tient son objectif : faire en sorte que subsiste toujours un chemin de YHWH à YiSs
eRâ‘éL et de YiSs
eRâ‘éL à YHWH. L’enjeu étant que chaque génération de TOUT YiSs
eRâ‘éL reste ouverte aux injonctions de l’ÊTRE que la fin du livre résumera de façon lapidaire : « Choisis la vie ! » ; dit autrement : « Ne réduis jamais l’ENTRE-DEUX de la TORâH à toi tout seul ! Ne perds jamais l’APPEL de YHWH qui crée cet ENTRE-DEUX comme le chemin de la VIE et de la BÉNÉDICTION, sans quoi tu te condamnes à la MALÉDICTION, c’est-à-dire à ne plus savoir discerner les POSSIBLES que YHWH ne cesse de proposer à qui consent à vivre dans l’ALLIANCE ! Allez lire le ch. 30 : vous verrez : c’est dit en toutes lettres !
Alors évidemment, comme ce qui ponctue ce chemin sont les Événements qui s’y produisent — les rencontres, les trouvailles, les victoires, tout autant que les guerres, les échecs ou les défaites —, on n’y avance qu’au rythme des secousses d’ÊTRE. Mais encore une fois, grâce à la lumière de la TORâH, ces secousses font avancer le peuple dans l’assurance d’être BÉNI, donc VIVANT.
On peut donc interpréter ainsi le v. 5 : « YiSs
eRâ‘éL, quand les choses n’iront pas à ton humeur, ne va pas faire passer tes enfants par le feu pour séduire ou apaiser la “colère” d’une prétendue divinité qui n’est qu’une pure projection de toi-même, incapable de te donner d’interpréter les secousses inévitables qui t’arrivent ! Donc reste le regard levé vers LE LIEU élu par YHWH ; et LÀ, fais mémoire de l’Alliance ! Fais mémoire des points d’appuis que YHWH a disposés sur le chemin dès l’époque des premiers patriarches ! Réponds à l’appel de l’ENTRE-DEUX qui te relie charnellement à YHWH, ton ‘ÈLoHîM; et transmets cette mémoire à tes fils pour que jamais une seule génération de tes descendants n’en vienne ne se perdre dans l’errance ! »
Bien. Maintenant, oui : cette non-compromission est vissée à un cadre violent. De ce point de vue, le livre de Y
eHOShOu“a / Josué s’en fera largement l’écho. Alors on sait aujourd’hui que ce livre est mythique : il n’y a jamais eu de conquête du Sol promis par le peuple Hébreu rangé en ordre de guerre. En revanche, en étudiant les circuits et les batailles, on s’aperçoit que les batailles racontées reprennent les exactions assyriennes en se les attribuant ! Comme pour répondre aux Assyriens qui faisaient de leurs offensives des récits terrifiants de propagande pour effrayer par avance les nations qu’ils allaient conquérir ! Or les rédacteurs du livre de Y
eHOShOu“a — de la même école Deutéronomiste, à une période tardive, vers le vi-v
e s. — ; or donc, les rédacteurs du livre de Y
eHOShOu“a se disent une chose assez judicieuse : en fait, si nous reprenons à notre compte ce qu’ont fait les Assyriens, c’est parce que la destruction des villes-sanctuaires qu’ils ont opérée, est en réalité le signe de ce que nous devons vivre : pas de compromission avec les idoles ! Le livre de Y
eHOShOu“a ne dit que ça. Et oui : c’est violent !
Pourquoi ? Mais parce que l’assaut idolâtre est lui-même violent ! Donc il faut savoir s’en défendre ! Les prêtres-prophètes de Bâ“aL ou de AShéRâH n’étaient pas des anges ! Les sanctuaires délimitaient des territoires politiques, et quand, à cette époque — on l’a souvent dit —, à chaque printemps, les roitelets qui régnaient encore sur des villes partaient avec leurs armées pour affermir ou pour élargir leurs frontières, c’était en se mettant sous la tutelle des idoles locales qui étaient censées les protéger. Ceci dit, s’agissant de YHWH et de la TORâH, la violence est d’une autre nature, ne serait-ce que parce qu’elle n’appelle en aucun cas à une violence gratuite, et là, on touche un point essentiel : la TORâH ne commande pas de détruire pour détruire à la mode assyrienne ! Il ne s’agit pas d’étendre un territoire, même si les velléités demeurent — mais YHWH se chargera de les contenir, ne serait-ce qu’avec l’Exil. Il ne s’agit pas non plus d’éradiquer une idéologie pour la remplacer par une autre ! Définitivement, YHWH n’est pas une idole ! Et s’il s’agit effectivement ici de détruire les sanctuaires concurrents, c’est en vue de se protéger SOI-MÊME des dangers de l’idolâtrie ; il s’agit pour TOUT YiSs
eRâ‘éL de détruire sur son SOL, c’est-à-dire EN SON SEIN, tout germe de compromission pour ne pas trahir l’ENTRE-DEUX — l’Alliance — avec YHWH et se retrouver esclave de soi-même en ne faisant plus que du sur-place.
Par ailleurs, un signe important manifeste que la TORâH n’est définitivement pas une idéologie : c’est qu’elle compte avec le TEMPS. Et c’est bien la raison pour laquelle il est si important de comprendre qu’elle n’a commencé à être rédigée qu’APRÈS-COUP, au vii
e siècle. SUR LE COUP, les clans ont vécu ce qu’ils avaient à vivre, comme ils ont pu, à l’aune de leurs traditions propres. Des prophètes ont alors surgi, d’abord dans le Nord avec Osée, ou Amos ; puis dans le Sud… mais leurs prédications n’ont pas eu d’effet : c’était trop tôt ; ce n’est qu’APRÈS COUP, une fois TOUT YiSs
eRâ‘éL rassemblé autour de Y
eROuShâLaYiM, puis envoyé en Exil à Babylone qu’on les a écoutés, et que les scribes Deutéronomistes et Sacerdotaux ont rassemblé les traditions pour en faire le récit normatif de la TORâH. Mais donc, pour ça, il a fallu du TEMPS ! Beaucoup de TEMPS pour que se dégage une Sagesse éprouvée, à recevoir par les générations successives comme leur héritage le plus précieux. Et c’est là que l’on discerne que la TORâH ne relève pas de l’idéologie. Pourquoi ?
Parce qu’à l’inverse, une idéologie se reconnaît précisément à son empressement. Au ii
e s., le grand Tertullien écrivait :
« Tout péché a sa source dans l'impatience. Le mal n'est que l'impatience du bien. » — (De Patientia, V). Or précisément, l’un des critères de discernement de la vérité de la TORâH, de la BÉNÉDICTION qu’elle porte, c’est qu’elle prend le TEMPS : tout n’est pas dit ni emballé en un instant ! Elle joue le jeu du TEMPS, elle rythme le TEMPS ; et comme disait Abraham Heschel, elle va jusqu’à bâtir le TEMPS en l’explicitant et en lui donnant sens, génération après génération. La VÉRITÉ de la TORâH ne consiste pas en l’adhésion à une idée, mais en la capacité d’INTERPRÉTER chaque instant de l’existence à la lumière des fondements patiemment élaborés et éprouvés par le TEMPS. Là se reconnaît l’inspiration qui vient de YHWH. Là se dévoilent les ressorts de la BÉNÉDICTION :
« Il y a un moment pour tout,un temps pour tout désir sous les ciels :un temps pour enfanter, un temps pour mourir ;un temps pour planter, un temps pour arracher le plant.Un temps pour tuer, un temps pour guérir ;un temps pour entailler un temps pour bâtir.Un temps pour pleurer, un temps pour rire ;un temps pour se lamenter, un temps pour danser.Un temps pour jeter des pierres, un temps pour ramasser des pierres ;un temps pour étreindre, un temps pour s’abstenir d’éteindre.Un temps pour chercher, un temps pour perdre ;un temps pour garder, un temps pour jeter.Un temps pour déchirer, un temps pour coudre ;un temps pour se taire, un temps pour parler.Un temps pour aimer, un temps pour haïr ;un temps : la guerre, un temps : la paix. » (Qo 3,1-8).
Bref : tout ce qui tente de s’imposer en urgence n’est qu’idolâtrie et mensonge.
Donc redisons-le : oui, le contexte est violent, mais pour qui veut bien ne pas rester à la surface de lui-même, c’est avant tout un travail SUR SOI qu’il faut discerner dans ce début du ch. 12 ; un travail SPIRITUEL long et patient qui va permettre au peuple de trouver son unité dans la communion avec YHWH. Et là rappelons-nous : vous et moi sommes tranquillement assis dans un fauteuil en lisant ces lignes ; mais à cette époque, la violence est PARTOUT ! — comme aujourd’hui d’ailleurs, sauf que nous, on cache cette violence pour ne pas se laisser interroger par elle ! Du coup, cette violence ininterprétée travaille dans l’ombre CONTRE nous ! Mais bon. —
Tout à l’inverse, la violence qui sait s’avouer — c’est un peu le rôle de la confession pour les chrétiens catholiques, soit dit en passant — ; la violence qui sait se dire en pleine lumière, comme dans nos versets, est une énergie qui consent à être interrogée, à être travaillée par les APPELS de YHWH, et pour, à terme, se convertir en ÉNERGIE DE VIE. Voilà le travail de la TORâH que les scribes tardifs de YiSs
eRâ’éL appelleront la SAGESSE. Tous ceux qui, en revanche, préfèrent voiler leur violence, ou justifier leur idéologie en affirmant que la fin justifie toujours les moyens ; de tels mafieux se condamnent à être les esclaves de leur propre violence qui se retournera nécessairement contre eux un jour ou l’autre, et les mettra à mort. Ce que les sages de YiSs
eRâ’éL dénoncent comme la FOLIE :
« Et maintenant, fils, écoutez-moi, faites attention aux dires de ma bouche : que ton cœur ne se détourne pas dans les chemins [de la folie] ; qu’il n’erre pas dans ses sentiers, car nombreuses sont les victimes qu’elle a fait tomber ; et ils étaient vigoureux, tous ceux qu’elle a tués. Sa maison est le chemin du Shéol, qui descend jusqu’aux chambres de la mort. » (Pr 7,24-27). Voilà.
Alors on s’est pas mal attardé sur ces deux versets 4 & 5, mais il me semble que ça en valait la peine. C’est ça : « scruter les Écritures » ! C’est tenter de voir ce qu’elles contiennent de non-dit, et pourtant bel et bien là et plein d’enseignements pour qui veut bien se mettre à l’écoute de YHWH. Ceci dit, on ira plus vite la prochaine fois et on finira la lecture du ch. 12. D’ici là, je vous souhaite une lecture féconde de ces quelques versets.
Encore merci pour ceux d’entre vous qui avez fait ou envisagez de faire quelques dons à l’association Va vers Toi qui gère le site de La Bible en Tutoriels ! N’oubliez pas : c’est en bas à gauche de la page d’accueil du site.
Je vous remercie.
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