28-12-2021

[Dt] Donne-nous AUJOURD'HUI le pain de notre besoin

Deuteronomy 6:6 par : Père Alain Dumont
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« Ces paroles que moi-même, je te commande AUJOURD’HUI, seront sur ton cœur ! » (Dt 6,6) Quelle puissance dans ces paroles ! Elles ont un impact jusque dans la prière du Notre Père que Jésus nous a apprise à manger, à garder sur notre cœur !
Transcription du texte de la vidéo : 
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article

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Bonjour,

Nous avons vu la dernière fois tout ce qu’implique le fameux AUJOURD’HUI qu’on retrouve régulièrement dans la Bible à la suite du Deutéronome. Je vous rappelle que cet AUJOURD’HUI est un MOMENT du TEMPS auquel l’exercice du MÉMORIAL, qui est un exercice RITUEL, nous arrime spirituellement ; de sorte que fondés dans ce MOMENT SACRÉ comme on pose ses fondations sur un ROC, nous puissions bâtir une HISTOIRE et en transmettre la MÉMOIRE, génération après génération ; « bâtir le TEMPS » disait Abraham Heschel.

Alors une fois qu’on a compris ça, regardons jusqu’où ça nous mène, nous Chrétiens, en particulier dans cette toute petite demande inscrite au cœur du Notre Père que Jésus enseigne à ses disciples : « Donne-nous AUJOURD’HUI le pain dont nous avons besoin. » (Mt 6,11) — Je prends ici la tradition sur le syriaque qui est bien souvent plus simple et plus claire, comme ici, et qui est à la base du texte en grec. Donc : « Donne-nous AUJOURD’HUI le pain dont nous avons besoin. »

Sur la base de la TORâH qui est définitivement désormais notre fondement interprétatif, prenons le temps de contempler le cadre de cette prière. En fait, à bien la scruter, elle semble structurée sur le cadre du peuple réuni au Mont H.oRèV — on pourrait aussi montrer qu’elle s’articule sur la structure du Temple de Jérusalem, ce qui n’est pas étonnant dans le cadre de la pensée analogique juive ; mais les deux sont intimement liés, et en ce qui nous concerne, nous allons nous en tenir au fondement des fondements, à savoir le cadre de la TORâH !  Toujours est-il qu’à y regarder d’un peu près, on s’aperçoit que les trois premiers versets pourraient bien s’inscrire dans le cadre de la Nuée céleste qui couvre le Mont H.oRèV.

– « Notre Père… » Bon, il y aurait beaucoup à dire sur cette dénomination de YHWH, mais ça n’est pas notre objet. Ce qui nous importe, c’est d’entendre ici que « Notre Père » renvoie à une FILIATION COMMUNE — « NOTRE » Père — qui, comme telle, ne caractérise rien de moins que le PEUPLE — à la différence de la nation qui n’a pas de père et que la Bible rattache à la dispersion — ; dire « NOTRE Père », c’est donc affirmer d’emblée qu’on appartient à un PEUPLE. Or qui dit peuple dit, d’une part, le consentement à vivre sous une loi propre qui nous est commun. Et qui dit peuple, d’autre part, dit une aspiration à se rassembler ; et dans notre contexte, à se rassembler au pied du Mont H.oRèV comme va le suggérer la suite.

« Notre Père qui es dans les cieux » : que contemple-t-on au sommet du Mont H.oRèV, sinon les cieux qui descendent sur la terre ? Rappelons-nous par exemple la vision des anciens qui entrent avec Moïse dans la Nuée, dans le livre de l’Exode : « Et à Moïse, [YHWH] dit : « Monte vers YHWH, toi et ‘AHaRoN, NaDaV et ‘AViHOu, et 70 des anciens de YiSseRâ’éL, et prosternez-vous de loin. […] Moïse monta, ainsi que ‘AHaRoN, NaDaV et ‘AViHOu et 70 des anciens de YiSseRâ’éL. Ils virent le ‘ÈLoHîM de YiSseRâ’éL ; sous ses pieds, c’était comme un ouvrage en plaques de saphir, comme la limpidité des cieux pour la pureté. Et sur les notables des fils de YiSseRâ’éL, Il ne porta pas la main ; ils contemplèrent le ‘ÈLoHîM, ils mangèrent et ils burent. »  (Ex 24,1.9-11). On est vraiment, dans cette Nuée, dans un environnement céleste que les mots peinent à décrire, comme dans les visions du prophète YeH.èZeQé’èL / Ézéchiel, ou celles de saint Jean dans l’Apocalypse. Reste qu’on y « mange » et qu’on y « boit ». Alors on y mange quoi ? Mystère… mais la suite va nous éclairer.

– « Que Ton Nom — HaShèMKha : c’est YHWH ! — soit sanctifié. » Alors c’est quoi, la « sanctification du Nom » ? Eh bien avant tout, c’est le QiDDouSh YHWH de la tradition juive : chaque fois qu’il accomplit une MiTseWâH sur la terre, tout Juif rend hommage à YHWH et sanctifie son Nom — ce qui sera le cœur de l’œuvre de Jésus.

Reste que pour l’instant, on est dans les cieux, tels que les voit le prophète YeSha“eYâHOu / Isaïe : « L’année de la mort du roi “ouZZiYYâHOu / Ozias — qui était roi de Juda jusqu’en l’an 740 avant J.-C. —, j’ai vu ‘ADoNaŸ assis sur un trône dressé et élevé, et ses pans remplissant le Temple. Des SseRâPhîM se tenaient au-dessus de Lui […] L’un criait vers l’autre et disait : Saint ! Saint ! Saint ! YHWH TseVâ‘OT — YHWH le Rassembleur — ! Toute la terre est pleine de Sa gloire ! » (Is 6,1-2a.3-4).

Alors c’est quoi, proclamer que dans les cieux, YHWH est SAINT ? Proclamer que YHWH est SAINT, c’est d’abord proclamer qu’Il est le TOUT AUTRE : il est à part ! QaDoSh, c’est ce qui est « à part » en hébreu. QâDaSh, c’est sortir de l’ordinaire ; c’est être pur de tout ce qui est commun, de tout ce qui est profane… Dit autrement, ce qui est QaDoSh, c’est tout ce qui échappe à l’emprise de l’homme — et ça, c’est très énervant pour l’homme qui déteste qu’on lui fasse sentir qu’il n’est pas tout puissant, qu’il n’est pas dieu en ce monde ! Et à en croire YeSha“eYâHOu, la chose est tout autant valable aussi pour les anges : YHWH échappe à toute possibilité de manipulation de leur part ! Du coup, consentir à SANCTIFIER le Nom de YHWH, c’est consentir à ce qu’Il se pose comme un vis-à-vis irréductible, souverainement et éternellement LIBRE. Il n’est définitivement pas une idole fabriquée de main d’homme — entendons par là qu’il n’est pas la projection de l’ego humain qui se laisse guider par la convoitise et qui rêve de pouvoir tout s’aliéner, Dieu y compris ! Et donc voilà… Sanctifier le Nom, c’est-à-dire littéralement, « sanctifier YHWH », c’est affirmer que ni les anges, ni les hommes ; ni au ciel, ni sur la terre ; absolument personne ne peut aliéner YHWH du seul fait qu’en Lui, rien ne prête à une quelconque convoitise ! Or c’est précisément à l’avènement d’un monde selon YHWH, où toute convoitise s’épuise, que l’homme aspire. D’où la demande qui suit :

– « Que ton Règne vienne ! ». C’est quoi, ce « Règne » ? Eh bien : quand on visite la culture de Jésus, ce ne peut être que le Règne de la TORâH de YHWH ! Une TORâH céleste, qui est la Sagesse même inscrite dans le cœur de YHWH dès avant la création du monde, dit le Talmud, d’après le passage du livre des Proverbes : « YHWH m’a acquise [dit la Sagesse] au commencement — « Au commencement ‘ÈLoHîM crée », dit le premier verset de la Genèse ; c’est le même terme — YHWH m’a acquise [donc] au commencement de son chemin, dès avant ses œuvres  — avant même l’œuvre de la création —. » (Pr 8,22). De là, à l’époque de Jésus, la tradition va associer cette Sagesse éternelle à la MèMeRaH / le Verbe qui possède en Elle la TORâH éternelle. Dès lors, dans la mesure où l’on accepte que Jésus soit la MèMeRaH de YHWH incarnée, le Verbe fait chair, eh bien Il porte en Lui le Règne de YHWH ; le Règne de la TORâH inscrit désormais dans un cœur de chair selon le vœu de la prophétie de YeH.èZeQé’èL / Ézéchiel ; et qui n’est autre que le Règne du Père qui a pénétré le cœur de sa création dans un mystère d’épousailles tout à fait inattendu.

C’est ce qui fait que quand Jésus répondra à Pilate qui lui demande s’il est roi, il peut dire en plénitude : « Mon règne n’est pas de ce monde-ci. » (Jn 18,36). Eh non : son Règne est céleste, il est dès avant la Création, il est tout intérieur, il est la matrice même du VIVANT — ce n’est pas un règne de mort, contrairement à celui de l’empereur romain ! Jésus est, en Sa personne, la TORâH faite chair en réponse à la supplique des justes, comme dans le Ps 119 : « Ta TORâH fait mes délices plus que tout autre richesse ! ». Par ailleurs, c’est la même attente du Règne qui conclut le livre de l’Apocalypse : « L’Esprit et l’Épouse disent : “Viens !” — Oui, je viens promptement ! — Amen ! Viens Seigneur Jésus ! » (Ap 22,17.20). Car ce Règne, redisons-le, est celui des épousailles de YHWH avec sa Création, à l’intime de sa Création ; et là, tout se tient : c’est le Règne de la sainteté au sens où la liberté divine absolue est la condition sine que non pour que YHWH puisse se donner à nous en vérité, sans que nous n’ayons à craindre aucune convoitise de sa part. Ce qui suppose aussi que je consente à mon tour à renoncer à convoiter YHWH ; que je consente à faire grandir en moi la vraie LIBERTÉ, épurée de toute convoitise ! C’est ça que vise l’avènement du Règne de YHWH dans la mesure où la liberté des deux parties est la condition pour qu’une véritable communion  NUPTIALE soit possible entre elles ! Et vivre en communion libre avec YHWH, c’est faire les délices de Sa volonté exprimée dans la TORâH ; une volonté de vie qui se dévoile , en vérité, répondre à MA volonté la plus profonde ! YHWH nous a créés à son Image : Il est fait pour nous et nous sommes faits pour Lui… D’où la demande suivante :

– « Que Ta volonté soit faite comme au Cieux sur le sol ! » Là, on demande vraiment que la TORâH des Cieux descende sur le sol, dans la ligne directe des prophètes et des psaumes : « Ah ! Si Tu déchirais les cieux ! Si Tu descendais ! » (Is 64,1). Or c’est précisément ce qui est décrit au Mont H.oRèV, comme l’a judicieusement relevé le Psalmiste : « Il abaissa les cieux, et Il descendit : Il y avait une épaisse nuée sous ses pieds. » (Ps 18(17),9) ; « YHWH, abaisse Tes cieux, et descends ! Touche les montagnes, et qu’elles soient fumantes ! » (Ps 144(143),5). On pourrait multiplier les citations.

C’est toujours la même dynamique : il ne suffit pas que YHWH descende DANS la Nuée ! Il faut encore qu’Il descende DE la Nuée, ce qui va se faire par sa Parole, par le don de sa MèMeRaH en qui réside la TORâH ; une “descente” qui relève proprement, dans un premier temps, de la mission de Moïse ; et puis dans un second temps de la mission de la MèMeRaH faite chair, de Jésus : « Écoute, YiSseRâ’éL, les décrets et les jugements que moi, j’énonce aujourd’hui à vos oreilles. Apprenez-les et gardez-les pour les faire — pour les mettre en pratique — ! » (Dt 5,1) ; « Ces paroles que moi-même je te commande AUJOURD’HUI, seront sur ton cœur ! » (Dt 6,6). C’est la communion des volontés. Encore faut-il connaître, garder, se nourrir de cette volonté exprimée dans la TORâH, ce qui nous amène à la supplique suivante :

– « Donne-nous AUJOURD’HUI le pain de notre besoin. » Alors c’est quoi ce pain, et pourquoi AUJOURD’HUI ? Si on a bien compris ce qu’on a essayé de dire dans la dernière vidéo, cet AUJOURD’HUI n’est rien de moins qu’une convocation de toute l’Église à faire MÉMOIRE que YHWH, et YHWH seul, sait donner le pain qui rassasie les fils de Dieu. Le pain se dit en hébreu LèH.èM. Or LèH.èM ne désigne pas seulement la pâte de farine cuite au four. La racine LâH.aM signifie « manger ». Donc LèH.èM, c’est tout ce qui se mange : le pain, bien sûr, mais plus largement : toute nourriture ; tout ce qui est nourrissant. C’est ce qui va faire par exemple que LeH.OuM, un mot bâti sur la même racine que LèH.èM, désigne… la CHAIR ! Entre parenthèse, ça explique pourquoi, en Jn ch. 6, Jésus puisse dire : « le pain que je vous donne, c’est ma chair. » Il s’appuie sur un sport proprement hébraïque où l’analogie des mots basée sur leur racine commune fait force de loi en matière d’Interprétation. Donc quand Jésus joue sur la correspondance sémantique entre LèH.èM, le pain et LeH.OuM, la chair, ce qui donne en hébreu : HaLèH.èM ‘aShèR ‘èTTeNèNNOu HOu‘ LeH.OuMî.    Ce passage de LèH.èM, le pain, à LeH.OuM, la chair, formellement parlant, ne surprend pas son auditoire. Maintenant, est-ce qu’ils ont compris, là c’est autre chose ; et s’ils ont perçu quelque sens, c’est tellement difficile à recevoir que nombre de disciples lâchent Jésus à ce moment-là.

Ceci dit, la question rebondit : que signifie dans le Notre Père ce LèH.èM, cette « nourriture de notre besoin » à recevoir AUJOURD’HUI ?

Eh bien : la TORâH me dit explicitement que ce LèH.èM, cette nourriture, ce pain, n’est autre que la Parole de YHWH, encore une fois sa MèMeRaH ! Dans quelques chapitres, on va entendre Moïse nous dire : « Le terreux ne vit pas que de pain seul — LèH.èM — ; le terreux vit de toute parole — toute MèMeRaH, traduit le Targum — qui sort de la bouche de YHWH. » (Dt 8,3). Ça, c’est de veine très prophétique ! On retrouve la même idée chez YiReMeYaHOu / Jérémie : « Tes paroles trouvées, je les mangeais — entendons : les paroles du Deutéronome qui commence à s’édifier à l’époque du roi Josias, je les APPRENAIS PAR CŒUR — ; Ta parole, pour moi : une jubilation, la joie de mon cœur, parce que Ton nom a été invoqué sur moi, YHWH, ‘ÈLoHîM TseVâ‘OT — Dieu rassembleur. » (Jr 15,16). Dans la même veine, on entend YeH.èZeQé’èL / Ézéchiel  nous dire : « YHWH me dit : “Fils de terreux, ce que tu trouves, mange-le — rappelons-nous Jérémie : « tes paroles TROUVÉES, je les mangeais » —. Mange ce rouleau — apprends-le par cœur ! — et va : parle à la maison de YiSseRâ’éL.” J’ouvris ma bouche, et il me fit manger le rouleau. Il me dit : “Fils de terreux, nourris ton ventre, rassasie tes entrailles avec ce rouleau que Moi-même, Je te donne.” Je mangeai, et dans ma bouche fut comme une douceur de miel. Il me dit alors : “Fils de terreux, va ! Viens-t’en vers la Maison de YiSseRâ’éL et parle-leur avec Mes paroles”. » (Ez 3,1-4). Vous entendez ? Le prophète est envoyé, non pas pour haranguer les foules avec son propre verbiage, mais avec les paroles mêmes dont il a été nourri, qu’il a apprises dans le Rouleau qu’il a « mangé » ; et c’est à partir de ce qu’il a ainsi appris qu’il peut ensuite transmettre cette parole en la proclamant et en entraînant le peuple à manger à son tour ces paroles pour arrimer son histoire à la MèMeRaH de YHWH.

Donc, pour en revenir à la prière de Jésus, pour celui qui fonde son intelligence dans la TORâH, manger « le pain de notre besoin », ce ne peut être que le LèH.èM dont nous avons un besoin vital ; c’est-à-dire la PAROLE du Père. Et parce qu’en Christ, le LèH.èM — le pain, donc la parole qu’Il est en Personne, Lui qui est le VERBE de YHWH — ; parce qu’en Christ donc, le LèH.èM se fait LeH.OuM : le pain se fait CHAIR à MANGER, eh bien Jésus nous fait rejoindre YiReMeYaHOu / Jérémie et YeH.èZeQé’èL / Ézéchiel lorsqu’ils sont appelés à MANGER le rouleau pour faire d’eux des témoins lumineux du DIEU VIVANT ! Sauf que là, Jésus nous fait franchir un cap que les prophètes ne pouvaient pas imaginer, puisqu’Il inscrit cette assimilation dans un REPAS MÉMORIAL qui signifie qu’en mangeant, en mâchant ce LeH.OuM, nous entrons dans une COMMUNION SPIRITUELLE qui nous fait épouser CHARNELLEMENT le Verbe même de YHWH, la MèMeRaH du DIEU VIVANT ! Mais vous avez bien compris : se nourrir de l’Eucharistie va de pair avec manger la Parole de Jésus, l’apprendre par cœur ! Sinon, on tombe dans de la magie ! Et une fois sérieusement nourris de cette chair ; imprégnés de la MèMeRaH de Vie, les ténèbres ne pourront pas garder ceux qui auront épousé cette MèMeRaH ; ceux qui auront su se rendre disponibles pour participer au Festin des Noces de l’Agneau venu nous racheter de la mort éternelle en nous convoquant à manger, à assimiler sa chair. Du coup, on peut effectivement interpréter ce verset du Notre Père comme désignant l’Eucharistie.

Du coup, difficile d’imaginer une meilleure introduction à la communion eucharistique que la prière du Notre Père, qui exprime le MÉMORIAL qu’on est en train de vivre ; un MÉMORIAL qui nous attache temporellement au moment sacré de la Passion et nous fait entrer rituellement dans la bénédiction du temps : « Donne-nous AUJOURD’HUI le pain dont nous avons besoin. » (Mt 6,11) qui rejoint la convocation de Moïse :  « Ces paroles — donc le LéH.èM dont Israël a besoin — que Moi-même, Je te commande AUJOURD’HUI — c’est-à-dire que Je te donne AUJOURD’HUI —, seront sur ton cœur ! » (Dt 6,6). Allez, depuis le temps, j’espère qu’on commence à s’habituer avec ces jeux analogiques qui nous font passer d’un plan à l’autre et ouvrent des horizons toujours aussi riches qu’inattendus.

Dès lors, les dernières demandes du Notre Père s’enfilent assez logiquement : cette Parole, ce LèH.èM devenu le LeH.OuM de Jésus qui donne la VIE ; cette Parole donc, il s’agit de la GARDER, de l’assimiler parce que c’est d’elle et d’elle seule que procède la puissance de la MISÉRICORDE de YHWH qui peut enfin travailler en nous : non seulement pour nous remettre nos dettes, mais nous retenir dans la tentation, de sorte que cette puissance de VIE proprement divine, spirituelle, charnelle, ne nous quitte jamais.

Et puis surtout, surtout, illuminés de l’intérieur par cette Parole, nourris, vitalisés et donc BÉNIS — il ne faut pas perdre cette nomenclature deutéronomiste — ; BÉNIS donc par cette Parole inscrite dans notre chair, les ténèbres du Malin perdent toute prise sur nous ! « Retire-nous du Mauvais ! » Et là YHWH a déjà anticipé cette demande à travers son commandement. La réponse n’est pas une assistance, mais une convocation à CHOISIR : ou YHWH, ou le Mal. Et comment s’opère ce choix ? Par le travail qui consiste à inscrire sa Parole en nous, ou pas ! « Ce commandement — de garder ma Parole — que Moi, Je te commande aujourd’hui n’est ni impossible pour toi, ni lointain. Il n’est pas dans les cieux pour que tu dises : qui montera pour nous aux cieux et le prendra pour nous ? Qui nous le fera écouter afin que nous le fassions ? Il n’est pas de l’autre côté de la mer pour que tu dises : qui passera pour nous de l’autre côté de la mer et qui le prendra pour nous ? Qui nous le fera écouter afin que nous le fassions ? Car la Parole est proche de toi : sur ta bouche et dans ton cœur — à condition que tu choisisses de la GARDER comme Je te le commande — afin que la faire. Vois, Je mets devant toi la Vie et la Mort, la Bénédiction et la Malédiction : choisis la vie ! » (Dt 30,11-15)

Dit autrement, là où est reçue la Parole mangée comme un pain, incarnée qui plus est en Christ — une CHAIR non pas faite pour être adorée de l’extérieur, mais pour être assimilée de sorte que s’enracine en NOTRE CHAIR, en notre HISTOIRE, en notre MÉMOIRE, la Parole de Jésus apprise par cœur — ; là donc où est reçue la Parole mangée en MÉMORIAL, là est le Règne du Père que le Christ nous donne de rejoindre en nous associant à sa Passion. Là où Règne le Père, règne le Fils ; et là où règne le Fils, le Mauvais passe derrière : « Derrière Moi, Satan ! » (Mt 4,10). Pas plus la tentation que le diable qui en est à l’origine, n’a plus de prise sur nous ! Rappelons-nous que tout le combat de Jésus au désert se joue sur l’interprétation de la TORâH, ce qui ne doit plus nous étonner.

Du coup, revenons à la question essentielle : quel est mon besoin ? Pour le savoir, il faut scruter la TORâH ! Or la TORâH m’enseigne qu’il me faut consentir à vivre en m’appuyant sur le MÉMORIAL, c’est-à-dire pour nous le SACREMENT. Il me faut régulièrement faire mémoire rituellement de l’AUJOURD’HUI de YHWH pour m’y transférer spirituellement — la 4e dimension spiritualo-temporelle, vous vous souvenez — ; consentir à vivre charnellement ce moment sacré où, avec mes frères et sœurs, toutes générations confondues, je me place rituellement d’une part face à la Montagne où YHWH a commencé à nourrir son peuple par Sa parole. Et comme pour bien montrer qu’il ne s’agit décidément pas d’un lieu, d’un espace, mais d’un MOMENT du TEMPS à rejoindre par la mémoire, voici que cette montagne se déplace avec le peuple : d’abord le Mont H.oRèV, puis le Mont Sion à Jérusalem ; puis le Mont Thabor de la transfiguration, le Mont du Golgotha auquel est associée l’Eucharistie, et enfin le Mont des Oliviers — le Mont de l’Ascension. Autant de points d’appuis temporels, de points d’arrimages spirituels pour ma MÉMOIRE, qui ont la capacité de faire de mon histoire, de l’histoire de mon peuple, une BÉNÉDICTION qui m’entraîne vers toujours plus de VIE, quelles que soient les épreuves traversées.

Et bien sûr, la liturgie chrétienne reprendra le même appel, par exemple la nuit de la Nativité, à la suite de saint Luc : « AUJOURD’HUI nous est né un sauveur, le Christ, le Seigneur ! » Ou alors à Pâques : « AUJOURD’HUI, Christ est ressuscité des morts, Alléluia ! » : on va même redire cet aujourd’hui pendant huit jours d’affilée, on appelle ça l’octave — une octave = une huitaine — de Noël et l’octave de Pâques : l’AUJOURD’HUI du Salut dure huit jours... Or que fait ici la liturgie ? Elle fonde le peuple de YHWH en le convoquant, toutes générations confondues, à faire MÉMOIRE de cet AUJOURD’HUI, de ce MOMENT SACRÉ où en Jésus, le Père ouvre à tous les hommes le chemin de la victoire de la Vie sur la mort. AUJOURD’HUI est donc, en régime chrétien greffé sur la racine de YiSseRâ’éL, une CONVOCATION rituelle à vivre la communion des saints qui ne peut exister que dans notre rassemblement commun au jour où le Christ offre sa vie en sacrifice pour le Salut du monde.

Comme quoi les paroles de Moïse sont vraiment grosses d’un potentiel époustouflant. Et c’est bien pourquoi elles méritent d’être apprises par cœur, comme le demande encore une fois YHWH par la bouche de Moïse : « Ces paroles que moi-même, je te commande AUJOURD’HUI, seront sur ton cœur ! » (Dt 6,6) !

Voilà. On pourrait encore en dire beaucoup plus, mais on va déjà s’en tenir là. Je vous souhaite une belle méditation de ce v. 6, et si possible, prenez le temps d’apprendre les versets 4 à 6 par cœur : ce sont des versets de vie, le LèH.èM de YHWH, mais qui ne peut transmettre la vie qu’à ceux qui le mangent en se laissant convoquer dans l’AUJOURD’HUI où cette parole a été donnée, où chacun se trouve joyeusement en communion avec le peuple qui lui a donné le jour…

Nous verrons la suite la prochaine fois.

Je vous remercie. Et merci pour ceux d’entre vous qui avez fait quelques dons ! N’oubliez pas : c’est en bas à gauche de la page d’accueil du site de La Bible en Tutoriel. Si vous voulez bien sûr qu’on puisse continuer à pouvoir éditer des vidéos !
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