19-12-2014

[Gn] 27 - Le combat de Jacob (2/2)

Genèse 32 par : Père Alain Dumont
Jacob a lutté victorieusement avec l'ange, ce qui lui vaut son nom d'élu: Israël. Où Jacob nous apprend que, pour être élu, il faut vouloir l'être jusqu'au bout.
Rubrique :Jacob
Duration:11 minutes 14 secondes
Transcription du texte de la vidéo :

(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/le-combat-de-jacob-partie-2.html )

Tous droits réservés.
Pour une citation, mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutorielhttp://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
_____________________________________________________________

Bonjour,

Nous avions laissé Jacob à l’orée du jour, après avoir roulé avec l’Ange dans la poussière et avoir donné dans ce combat toute son énergie, au point que l’Ange considère qu’il a gagné.

Alors vient le changement de nom : « On ne t’appellera plus Jacob, mais Israël car tu as lutté avec DIEU et avec des hommes et tu l’as emporté ».

Ah bon ? Pour une fois qu’il dit son vrai nom, voilà qu’on le change encore ! Oui, mais cette fois, c’est le nom de la bénédiction.

Israël, d’après une étymologie populaire, est un nom de Victoire : compression de Ish Sarah El
Ish : homme
Sarah: le verbe lutter, mais la racine Sar dit aussi le prince. D’ailleurs, Sarah veut dire princesse… Cela voudrait donc plutôt dire : Un homme a été un prince devant DIEU ! Celui qui a été un prince, celui qui est DROIT devant DIEU ? C’est le nom d’une conquête : la conquête de Jacob avec sa propre identité d’homme. Ce nom résume toute son histoire, et toute l’histoire de ses descendants.
El : DIEU

Mais c’est une étymologie populaire, parce que lexicalement, on ne voit pas du tout de quelle racine peut venir ce nom en hébreu. En réalité, en dehors de cette étymologie populaire, il semble bien plutôt que ce mot ait en fait une étymologie égyptienne. Nous y reviendrons avec la grande saga de Joseph.

Mais bon. En tout cas, un juif parlera volontiers de “notre père Jacob”, et se dira “fils d’Israël”, mais c’est la même personne. Donc Israël n’est pas le nom d’une terre mais d’un fondateur, comme d’ailleurs Edom, Moab, Galaad etc… Et c’est surtout un esprit, un élan de vie marqué par la conquête ! Par le courage ! Le Fils d’Israël, c’est un talonneur conquérant et droit !

Alors là, il ne dit plus : « DIEU était là et je ne le savais pas », mais J’ai vu DIEU face à face /bouche à bouche/ et elle a été libérée, sauvée, mon âme ! », Ma nephesh, ma gorge… le lieu du souffle, donc de la vie. Bouche à bouche, comme une nourriture…

Et voilà qu’il passe Pénouël, mais… il boîte de la hanche… Alors on vous parle du nerf sciatique qui a été touché, que les fils d’Israël ne mangent pas le nerf sciatique… mais bon. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’avant, Jacob était un prétentieux : il boitait de l’intérieur ! Maintenant, il a vécu une véritable initiation — et c’est sans doute ça que visait Isaac en l’envoyant au loin éprouver la bénédiction qu’il avait volée — : il est fier, mais non plus orgueilleux. Il boite à l’extérieur, mais non plus à l’intérieur. Et là, tout va changer…

Alors que nous apprend cette histoire ?

Que pour être élu, il faut VOULOIR L’ÊTRE ! Et il faut être ENTIER, PUR si vous voulez. Pur, ce n’est pas une notion morale dans la Bible. C’est plutôt une notion “chimique” : un produit chimiquement pur, c’est un produit sans mélange. L’Élu, c’est celui qui veut l’être, et qui est prêt à en payer le prix : une lutte avec DIEU. Un passage du Livre de Judith (8,27) il est dit : DIEU flagelle ceux qui s’approchent de Lui… Il faut donc avoir un désir de pureté à toute épreuve ! Et ça, qu’on le veuille ou non, c’est la marque des fils d’Israël !

Normalement, ce devrait être aussi la marque du Chrétien, sauf qu’il le vit sur un mode différent. Cette lutte avec DIEU, tout juif pieux l’attend, l’espère, et la vit déjà en scrutant la Torah ! Un récit du Talmud raconte que lorsque DIEU voulut se choisir un peuple qui serait son témoin dans le monde, il a demandé à toutes les Nations et toutes ont refusé. Seul le plus petit d’entre les peuples a dit oui, et c’est le peuple d’Israël !

L’Élu, c’est celui qui assume, qui entérine jusqu’au bout, dans la droiture, la proposition divine : cela passe par l’ÉPREUVE DE L’ÉLECTION. Comme pour le Christ qui va, après son baptême, se perdre dans la poussière du désert pour un combat qui le mènera jusqu’à la Croix. Et puis on pourrait aussi parler ici de saint Paul, un vrai fils d’Israël qui rencontrera DIEU en tombant aussi dans la poussière sur le chemin de Damas. Il deviendra aveugle : il connaîtra la nuit, il perdra de sa superbe pour rencontrer le vrai DIEU, le DIEU d’Abraham, d’Isaac et Jacob, pour se rendre compte qu’il ne l’avait jamais rencontré en scrutant la torah, même à l’école de Gamaliel ! Il avait la niaque, mais il lui manquait d’avoir roulé dans la poussière.

Et pour nous le chemin est le même. C’est pour cela que Jésus dit : « Tous sont appelés, mais il y a peu d’élus » : DIEU appelle tout le monde, sans difficulté, mais combien répondent avec la niaque ? Combien sont prêts à lutter avec DIEU, c’est-à-dire traverser les épreuves qui vont les purifier, et non pas seulement faire valoir leurs droits comme on le fait aujourd’hui dans notre société victimaire ?

Passer par la porte large, c’est ne pas pouvoir éprouver notre désir, et nous perdre dans de vains combats, dans de vaines tromperies avec nous-mêmes, DIEU et les autres.

Que voulez-vous, il faut lutter pour voir DIEU bouche à bouche et devenir une source de bénédiction pour nos frères. Il nous faut passer par un gué et rencontrer DIEU en nous roulant dans la poussière avec Lui. Cesser de se dire : oh, je vais bien faire ma sauce à moi et m’en sortir quand même ! Tant qu’il s’en est tenu là, Jacob a été malheureux, trompé avant que tromper à son tour, lésé, fuyard, apeuré… jusqu’au moment de cette rencontre, encore une fois, dans la poussière.

Jacob pose la question à tout juif, mais aussi à tout chrétien : JUSQU’OÙ VA TON DÉSIR DE DIEU ?
Béthel, c’était une magnifique bâtisse qui allait jusqu’au ciel, mais lorsque les apôtres contemplent le Temple de Jérusalem, Jésus leur dit : Détruisiez ce Temple, et moi, je le rebâtis en trois jours !!! Il devront lutter eux aussi, et le combat de Jésus deviendra le leur : détruire en eux l’image spontanée de DIEU qu’ils se font à leur image : un DIEU partisan, dans le fond, et trop humain, mon dieu protecteur à MOI, un DIEU mercenaire à ma solde… C’était le DIEU de Béthel tel que Jacob l’a compris à l’époque ! Et maintenant, c’est autre chose.

Eh bien, la foi, c’est ça : elle passe par la destruction de l’idéologie que nous imposons à DIEU. Nous le voudrions magnifique, triomphal : mais c’est Babel !!!

Jacob pensait pouvoir monter au ciel par l’escalier pour trouver DIEU, mais voilà qu’il doit rouler dans la poussière pour le trouver véritablement !!! Et là, il éprouve son désir !!!

Vous savez, on ne sort pas indemne de ce genre d’épreuves.

Jacob en ressort en boitant, il ne faudrait pas croire que nous, nous en ressortirons en bombant le torse !!! Et c’est ça qui est dur. Jacob a perdu de sa superbe, mais il a trouvé DIEU au plus près. Il l’a vu panîm el panîm face à face / bouche à bouche / Il a gardé sa fougue, mais elle est devenue intérieure.

Toute l’énergie déployée pour faire sa place au milieu des hommes en les trompant, il en trouve la source : il avait soif de se confronter avec DIEU au plus près pour découvrir sa véritable identité. Cela lui fut accordé, parce qu’il s’est engagé et qu’il a appris de DIEU où canaliser son énergie personnelle, et qu’il a accepté de combattre pour cela, toute sa vie ! Et ce n’est pas fini.

La prochaine fois, nous verrons comment cette histoire se termine par une grande réconciliation, mais qui rebondira ensuite sur une grande et magnifique saga, la plus forte de toutes en rebondissements et en émotions, car les fils de Jacob, les Fils d’Israël devront eux aussi être initiés, renaître pour découvrir leur vraie vocation, et là encore, ce ne sera pas si facile…

Je vous remercie.