18-02-2016

[Ex] 67 - Derniers mobiliers et parfums sacrés

Exode 30:1-38 par : le père Alain Dumont
Après la consécration du Grand-Prêtre et de l'Autel, dernières instructions concernant l'Autel de l'encens, les bassins d'ablutions et la confection des différents parfums sacrés.
Duration:13 minutes 46 secondes
Transcription du texte de la vidéo :

(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/derniers-mobiliers-et-parfums-sacres.html)
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article
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Bonjour,

Nous ouvrons aujourd’hui le ch. 30 du livre de l’Exode. Apparaît ici un troisième élément important du MiShKâN : l’autel de L’ENCENS. Alors on pourrait se demander pourquoi cette description ne vient que si tardivement, parce que l’autel de l’encens n’est pas un mobilier annexe du Tabernacle : il fera partie du même ensemble que la Table des Pains de la Face et que la MeNoRaH, à l’intérieur du Sanctuaire. Certes, mais qualitativement, ce n’est pas le premier autel. La primauté revient à l’autel des sacrifices, à l’extérieur du Tabernacle, dont il fallait parler en premier. L’autel de l’encens, pour le dire rapidement, prend le relais à l’intérieur du Tabernacle. Et c’est là qu’on voit que le texte est composé très intelligemment. Nous, en tant que rationnels comme on dit, on aurait décrit les ensembles les uns après les autres : d’abord le Saint des Saint avec l’arche, puis le mobilier du Tabernacle : MeNoRaH, Table des pains et autel de l’encens, puis le mobilier extérieur avec l’autel des sacrifices et les bassins de bronze qu’on va voir dans un instant. Oui, mais non, parce qu’on n’est pas en train de faire un inventaire administratif ! En réalité, on ne peut pas parler de l’autel de l’encens avant l’autel des sacrifices parce que ça pourrait laisser penser que l’autel de l’encens serait premier, ce qui ne saurait pas être le cas. Pourquoi ? Parce qu’on sait que ce genre d’autels était très répandu dans le Moyen Orient, notamment en Égypte, associé plus ou moins à des rites magiques. Donc il ne fallait pas laisser croire que le culte de Moïse retombait dans ce genre de pratiques. Dit rapidement, l’autel de l’encens, à l’intérieur du MiShKâN, est en lien direct, intrinsèque, indissociable avec l’Autel des sacrifices, à l’extérieur, tout en restant dans l’enceinte. L’autel de l’encens, beaucoup plus petit, est attaché à la combustion des parfums qui suit les sacrifices de l’autel extérieur, de sorte que la fumée de l’encens devient la REPRÉSENTATION, à l’intérieur du Tabernacle, du sacrifice qui a été offert à l’extérieur, mais une fumée EMBAUMÉE. Et c’est ce lien entre les deux autels qui fait qu’on parle du « sacrifice de l’encens », qui représente comme l’essence spirituelle du sacrifice du grand Autel. Encore une fois les deux sont liés : il ne saurait y avoir de sacrifice spirituel, l’encens, sans sacrifice animal ou végétal, et inversement : le sacrifice extérieur serait vain sans celui de l’encens pour représenter ce sacrifice devant HaShèM à l’intérieur du Tabernacle ! Et ça, c’est vraiment nouveau. Que ce soit en Égypte ou en Mésopotamie à l’époque, les sacrifices extérieurs avaient valeur en eux-mêmes : on faisait fumer une partie animale ou végétale, et ça suffisait. On ne voit nulle part ce « relais », en quelque sorte, par un sacrifice de parfum. D’autre part, il y avait des sacrifices d’encens, mais on ne voit nulle part qu’ils aient été offerts en lien avec des sacrifices animaux ou végétaux. Or le propre du culte de Moïse va précisément ASSOCIER intrinsèquement les deux. Raison pour laquelle les Fils d’Israël ne pourront pas offrir de sacrifice ailleurs que dans l’enceinte du MiShKâN / et plus tard du Temple de Jérusalem /, faute de pouvoir relayer ces sacrifices par celui de l’encens offert devant HaShèM. C’est un peu comme ce qu’on disait de la Table des Pains de la Face à l’intérieur du MiShKâN qui représentait, rappelez-vous, toutes les tables d’Israël devant HaShèM. Comme si le MiShKâN était le lieu d’une CONCENTRATION DE TOUTES LES ÉNERGIES SPIRITUELLES D’ISRAËL ! Or en vous parlant de ça, je ne fais rien d’autre que d’ébaucher ce que sera plus tard la compréhension chrétienne des SACREMENTS. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est le même genre de lien qui unit chaque Eucharistie au Sacrifice du Christ sur la Croix. Raison pour laquelle d’ailleurs on y fait fumer l’encens ! Il y a eu le sacrifice du Christ, un sacrifice dont le Christ est à la fois le prêtre et la victime, comme dit l’épître aux Hébreux ; un sacrifice qui a eu lieu à l’EXTÉRIEUR du Temple, et même de Jérusalem, dont chaque Eucharistie est la REPRÉSENTATION devant le Père à l’intérieur de l’Église, et qui fait que chaque Eucharistie est elle-même un SACRIFICE, tout comme l’offrande de l’encens à l’intérieur du MiShKâN est un SACRIFICE de par son lien à celui qui a eu lieu à l’extérieur du Tabernacle. Vous voyez : il y a là quelque chose d’essentiel à comprendre : grâce à la ToRaH, la dynamique de la vie chrétienne trouve tout son sens… Pourquoi y a-t-il des sacrements ? Eh bien : la réponse se trouve là, dans le culte que Moïse, sous l’inspiration de HaShèM, qui est en train de mettre en place. J’espère vraiment que vous percevez l’importance phénoménale de la figure de Moïse, trop ignorée des chrétiens. C’est une manière aussi de comprendre la vérité de l’adage de saint Jérôme : « Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ », et c’est tout autant ignorer les fondements de la pratique de l’Église qui se reçoit entièrement de Moïse, par le Christ. Rappelons-nous : « Pas un iod de la ToRaH ne disparaîtra ! » disait Jésus (Mt 5,18). Eh bien, ce passage d’Ex 30 nous offre un exemple parmi les plus flagrants de la manière dont l’AT se positionne comme la racine incontournable du Nouveau.

Alors d’un point de vue pratique, nous dit-on, l’Autel de l’Encens fait environ 45cm de surface sur 90cm de haut, toujours avec une corne à chaque angle. Il est en bois de ShiTTîM recouvert de feuilles d’or, et comme tout le reste, il est censé être transportable par des barres qu’on enfile dans les anneaux qui lui sont attachés. Il est placé juste en vis-à-vis de l’Arche d’Alliance, juste devant le rideau qui sépare les deux pièces du MiShKâN. Il est purifié chaque année avec du sang du sacrifice pour les péchés, ce qui l’associe charnellement aux sacrifices extérieurs. Et le v. 10 de conclure les prescriptions concernant le mobilier qui fait la sainteté du Tabernacle : « Ce sera un QoDeSh QoDâShîM pour HaShèM », littéralement un « Saint des Saints » pour HaShèM. Dit autrement, l’essentiel est là : l’Arche derrière le rideau, la MeNoRaH, la Table des Pains de la Face de l’autre côté de ce même rideau ; l’Autel des sacrifices, dans l’enceinte, mais à l’extérieur, sans oublier l’autel de l’encens qui ramène en quelque sorte les sacrifices extérieurs à l’intérieur du Tabernacle, juste devant l’Arche, pour les représenter devant HaShèM. Le reste est second, ce qui ne veut pas dire accessoire.

Les v. 11 à 16 parlent alors d’un RECENSEMENT. HaShèM demande à Moïse de dénombrer les Fils d’Israël, ce qui, normalement, est interdit. David fera un recensement, ce qui mettra HaShèM dans une fureur terrible, parce que ce sera un recensement POUR LA GUERRE, alors que là, c’est un recensement pour le Sanctuaire qui veut dénombrer ses enfants ; l’intention est différente, raison pour laquelle, dit le v. 12, bien qu’il y ait recensement, il n’y aura pas de fléau punitif. Alors comment faire le recensement ? Tout simplement par la contribution pécuniaire de ceux qui se sentent concernés par le rachat que célèbre le culte de Moïse. Souvenez-vous : HaShèM, lors de la Sortie d’Égypte, a RACHETÉ les Fils d’Israël de l’esclavage. Ce « demi-sicle », ce « demi ShèQèL », c’est le même mot, représente une somme assez dérisoire, mais que chacun, justement, pourra donner, riche ou pauvre — ; mais surtout, ce demi-ShéQèL devient la marque de ceux qui ont conscience d’être l’objet de ce RACHAT, RACHAT qui est à la base de l’établissement du Tabernacle, puisque les sacrifices n’ont de valeur que parce qu’ils entretiennent la conscience que les Fils d’Israël ont été LIBÉRÉS ; qu’ils ne doivent leur liberté qu’à ce moment fondateur de la Sortie d’Égypte par lequel DIEU les a RACHETÉ à leur esclavagiste. C’est un peu comme la quête du dimanche. L’argent dont on fait le don est la marque d’un attachement au Christ Sauveur, sans quoi on ne met rien dans la panière : si on ne se sent pas attaché au Christ et à l’Église, pourquoi y injecter de l’argent ? Le mouvement, dans le fond, est le même, et c’est encore la ToRaH qui nous le rappelle. Bref. toujours est-il que le v. 16 dit que cet argent ira pour le service du tabernacle ; en réalité, dira le ch. 38, il ira d’abord pour sa construction.

Une cuve de bronze sera déposée, nous disent les v. 17 à 21, à l’intérieur de l’enceinte, entre le Tabernacle et l’autel des sacrifices, pour les ablutions des prêtres au moment d’officier. Alors pourquoi laver les mains et les pieds ? Pour une raison d’hygiène, diront les rationalistes ; parce qu’entre les mains et les pieds, c’est tout le corps qui est sanctifié, diront les autres, de la même manière que Moïse avait marqué tout leur agir en marquant du sang les lobes de leurs oreilles et leurs orteils, sauf qu’ici, il ne s’agit plus de consécration. Néanmoins, les gestes sacerdotaux ne sont pas des actes profanes ; ce sont des actes saints, À PART, et qui demandent donc une ablution particulière pour se démarquer des gestes de tous les jours.

On remarque qu’aucune dimension n’est donnée pour cette cuve. Plus tard, dans le Temple de Salomon, elle mesurera 5m de diamètre sur une hauteur de 2,50m. Mais bon : on imagine mal transporter un tel ustensile, et la quantité d’eau pour remplir 800m3 est encore une fois trop conséquente pour répondre à la situation du désert ! Sans doute la cuve devait-elle être de taille plus raisonnable. Quoi qu’il en soit, bien qu’elle en soit le préliminaire indispensable, elle n’entre pas, comme tel, dans le service du culte proprement dit, ce qui explique qu’elle ne soit mentionnée que tardivement dans toute cette description.

Les v. 22 à 33 nous livrent la recette de confection de l’huile sainte pour l’ONCTION du Tabernacle, du mobilier, des ustensiles et des prêtres. C’est une huile d’olives, comme toujours à cette époque, mêlée d’aromates selon les proportions suivantes : 2 parts de myrrhe et 2 parts de casse, c’est-à-dire une cannelle très épicée, 1 part de cinnamome et 1 part de roseau aromatique — un roseau dont la racine est bien connue des parfumeurs. Cette ONCTION confirme le caractère SAINT, SACRÉ, à part, de tout ce qu’elle oint, objets ou hommes. Et alors attention à qui en ferait un usage profane : la sanction sera l’exclusion de son clan, c’est-à-dire la mort. Le cadre est strict, on ne plaisante pas avec les choses saintes. La recette des encens quant à elle est plus ardue à préciser, du v. 34 au v. 37, du fait que le vocabulaire est difficile à traduire. Toujours est-il que cet encens relève des mêmes prérogatives que l’huile de l’onction. Il ne faut pas trop s’étonner de la place de tous ces parfums. Le culte des anciens en faisait grand usage, comme symbole d’offrande et d’adoration.

Voilà. Je vous laisse dans cette ambiance parfumée. Vous pourriez presque lire ce chapitre en allumant un bâton d’encens pour vous mettre dans l’ambiance… Enfin, quoi qu’il en soit, je vous souhaite une bonne lecture de ces versets par lesquels se clôt la description du MiShKâN, du Tabernacle du désert. Nous verrons la suite la prochaine fois.

Je vous remercie.
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