18-02-2016

[Ex] 61 - Le Candélabre et la charpente de la Demeure

Exode 25:31-26:37 par : le père Alain Dumont
Un dernier mobilier de l'intérieur du Sanctuaire, puis instruction concernant la structure de la Demeure : la charpente et les toiles de la Tente.
Duration:15 minutes 41 secondes
Transcription du texte de la vidéo :

(Voir la vidéo : http://www.bible-tutoriel.com/le-sanctuaire-du-desert-ex-25-31.html)
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Citation : mentionner : © Père Alain Dumont, La Bible en Tutoriel, http://www.bible-tutoriel.com/ + titre de l'article

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Bonjour,

Nous poursuivons dans cette vidéo la description du mobilier du Sanctuaire que HaShèM demande à Moïse de construire dans le désert, et nous voici arrivés au ch. 25 du Livre de l’Exode, v. 31 à 39 : la construction du CANDÉLABRE, la MeNORaH en hébreu, c’est-à-dire un grand chandelier à plusieurs branches. À nouveau, comme pour l’Arche, ‘aRON, MeNORaH nom est bâti sur la racine ‘oR, en hébreu, c’est-à-dire la LUMIÈRE. Et là, bien sûr, le lien est plus évident. Cette fois, plus question de bois recouvert de feuilles d’or : la MeNoRaH est en OR MASSIF, d’un seul bloc. Elle n’est même pas le résultat d’un montage. On a un chandelier central qui supporte trois branches de chaque côté, toutes surmontées d’un calice pour recevoir l’huile et la mèche à y faire brûler. Pour faire bref, la description correspond à cette représentation : Un pied, 1 chandelier central, 6 branches partant du chandelier, 10 calices en forme de fleurs d’amandier, dont 4 posées sur le chandelier central, 10 boutons à chaque intersection, 22 calices répartis sur les branches et 6 lampes allumées sur les branches latérales, orientées vers une lampe centrale sans que leurs flammes ne se rencontrent, un peu comme les KéROuBîM ont leur face tournée vers le cœur de l’Arche. On en déduit que la flamme centrale symbolise la lumière DIVINE. Un peu comme si les 6 autres lampes représentaient la création tournée vers Dieu sans qui elle n’est rien, sans qui, surtout, elle ne peut prétendre à aucune plénitude. On se souvient que 6, c’est le chiffre de l’incomplétude [7-1], mais là, étant tournée vers la lampe centrale, c’est comme si la création était tout entière tendu vers la lampe avec laquelle elles forment le chiffre 7 qui, lui, est le chiffre de la plénitude. Mais encore une fois, une plénitude qui ne peut venir que de HaSHèM symbolisé par la lumière centrale. Pour s’occuper du nettoyage,  le texte parle de mouchettes, c’est-à-dire de petits ciseaux permettant d’ôter les bouts de mèches carbonisées recueillies dans des cassolettes servant de cendrier. Le tout fabriqué à partir d’un talent d’or pur, c’est-à-dire environ 35kg, ce qui fait déjà un bon poids. On ne nous dit rien ici quant au sens de la MeNoRaH, sinon qu’elle fait partie du Temple céleste que Moïse contemple sur la Montagne, dit le v. 40, et c’est ce modèle qui servira à la confection de la MeNoRaH terrestre. Disons quelques mots tout de même sur ce mobilier qui est devenu un des symboles les plus forts du peuple d’Israël.

D’abord, la MeNoRaH a 7 branches symétriques. Normalement, un tel candélabre n’existe QUE dans le MiShKâN,  le Tabernacle, la tente sanctuaire. On a le droit de fabriquer des chandeliers à 2x2 branches ou 2x4 branches figées sur le chandelier central — c’est ce dernier modèle qu’on trouve dans les demeures juives aujourd’hui, qu’on appelle la H.aNouKiaH, et qui est allumée à la fête de H.aNouKaH, la Fête des lumières qui date de la période des Maccabée, au cours du IIe siècle avant J.-C. La forme de la MeNoRaH évoque un arbre au printemps, ce qui oriente sa signification vers la fécondité : la lumière de la MeNoRaH est une lumière féconde, qui procède de HaShèM pour illuminer le cœur de la Création, et en particulier le cœur du peuple élu par qui cette Création trouve son sens, tourné vers son Dieu comme vers sa Source.

La MeNoRaH était posée dans le Sanctuaire, du côté Sud ; la Table des Pains de la Face, elle, était posée côté Nord ; quant à l’Arche, elle était séparée de la Table et de la MeNoRaH par un immense rideau, côté Ouest. Chaque jour, un prêtre nettoyait la MeNoRaH et la rallumait pour qu’elle brûle toute la nuit et tout le jour. Donc, à part les prêtres qui, seuls, avaient le droit de pénétrer dans le Sanctuaire, le peuple ne la voyait jamais, pas plus d’ailleurs que la Table des Pains ! Les lampes des branches étaient tournées, on l’a dit, vers la branche centrale qui représentait la lumière perpétuelle de la lumière divine, qu’on retrouve dans toutes les synagogues — le NeR TaMiD — et dont nos lampes à côté du tabernacle eucharistique sont inspirées — tient, la réserve eucharistique prend le même nom que le sanctuaire du désert… Vous remarquerez que la Bible ne donne aucun détail sur sa taille, contrairement aux dimensions précises de l’autel et de la table des pains. Le Talmud dit qu’elle était à hauteur d’homme. Voilà en gros ce qu’on peut dire de ce candélabre sacré à ce stade. Même si elle représentait la LUMIÈRE divine présente au milieu de son Temple, elle ne faisait pas pour autant double emploi avec l’Arche. À l’époque du Christ, la tradition interprétait cette LUMIÈRE comme celle de l’Esprit de HaShèM, ce fameux souffle qui planait au-dessus de la surface des eaux au moment de la Création, et c’est d’ailleurs cette symbolique qu’on retrouvera en particulier dans le livre de l’Apocalypse.

Ouvrons maintenant le ch. 26 pour voir comment le sanctuaire était charpenté. Selon les auteurs, qu’on traduise MiShKâN par Tente, Tabernacle ou Demeure, il s’agit du Sanctuaire du désert qui accompagne les Fils d’Israël, c’est-à-dire le Lieu Saint — MiQDaSh, en hébreu —, le Lieu à part qui ne représente pas seulement l’axe symbolique du monde créé, comme en parle Mircea Eliade à propos des lieux sacrés des religions traditionnelles. Le MiShKâN représente bien plus l’ANTICIPATION DU MONDE A VENIR, où Dieu et l’homme pourront enfin se rencontrer. En ce sens, dans une vision chrétienne, le MiShKâN est comme la première étape à l’avènement de l’Incarnation et de la Résurrection du Christ Jésus, puisqu’en lui, Dieu et l’homme se rencontrent parfaitement, s’épousent parfaitement. Par Jésus, le Verbe fait Chair, est inauguré l’avènement du Royaume que préfigure le MiShKâN, un Royaume où Dieu sera tout en tous, comme disent saint Paul dans 1Co, au ch. 15,25, et le livre de l’Apocalypse, ch. 21,4-5. Mais évidemment, une telle rencontre se prépare de longue date pour que l’homme se libère de la tentation de mettre la main sur le divin, rendant impossible les épousailles, les Noces entre Dieu et l’homme. Qu’est-ce que vous voulez, ça prend du temps, et pour l’heure, seul Moïse peut entrer dans le mystère de cette relation, lui dont le cœur a été travaillé par HaShèM — on dira plus tard que HaShèM s’entretient avec lui comme un Ami parle à son Ami : tout est là ! Pourtant, on trouve néanmoins la trace d’un travail qui commence aussi pour tout le peuple à travers, mystérieusement, les matériaux de construction offerts comme des « dons du cœur », disait le début du ch. 25, et non comme un simple don généreux pour amadouer la divinité à laquelle on bâtit un sanctuaire. Ça, c’était bon pour l’Égypte, mais plus pour les Fils d’Israël. Tout ça, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’à travers ces DONS DU CŒUR, il y a tout de même quelque chose des Fils d’Israël qui est présent dans les rencontres de HaShèM et de Moïse. C’est petit, mais c’est déjà plus que symbolique : c’est déjà CHARNEL ! Grâce au MiShKâN, à sa structure même, le peuple n’est pas totalement à l’écart de cette rencontre. Redisons-le : ainsi, en inscrivant en lui la présence du peuple, le MiShKâN anticipe, est une figure de ce qui adviendra au terme, à la fin, lorsqu’encore une fois, Dieu sera tout en tous, par le Christ Jésus. Une fois qu’on a compris ça, on peut commencer à lire les détails de la construction, parce qu’elle n’est plus seulement celle d’un édifice sacré au sens habituel du terme : c’est un édifice DU CŒUR, un édifice CHARNEL qui aura un retentissement jusque dans la tradition chrétienne qui est l’ouverture à tous les hommes de cette intuition, de cette révélation qui est en train de se mettre en place, là, sous nos yeux de lecteurs attentifs.

Donc attardons-nous sur la structure du MiShKâN, constituée d’une armature en bois sur laquelle reposent de larges toiles de tente composées par des bandes cousues entre elles et sur lesquelles sont brodés des KéROuBîM. On retrouve les trois couleurs que nous avons déjà vues en introduction du chapitre : TeKhéLèT, l’azur, qui évoque le ciel ; ‘aReGGâMâN, le pourpre, qui évoque le monde animal à travers le coquillage dont il est issu ; et ToLé”âH, l’écarlate, qui évoque le monde végétal, puisque tiré de la cochenille du chêne. La couleur azur est intéressante, parce qu’elle renvoie au mot TaKheLiT qui signifie l’achèvement, la perfection… Donc le monde céleste auquel l’azur fait allusion n’est pas le ciel physique, mais le ciel spirituel, pourrait-on dire, le ciel où trône HaShèM. Comme pour dire que cette tente, rien qu’à travers les pigments qui lui donnent ses couleurs, fait déjà se rejoindre le monde fini et le monde infini vers lequel elle fait lever le regard.

Alors à nouveau, on va nous donner des dimensions extrêmement précises. La première tenture est composée, nous dit-on, de deux toiles de 5 bandes cousues entre elles, sans doute tissées en laine. Ça nous donne deux immenses toiles qu’on raccroche grâce à des boutonnières reliées par des agrafes. Le tout forme une tenture de 18m de long et de 12,6m de large. Par-dessus, une seconde tenture est posée, en poils de chèvres cette fois, un peu plus longue : de 19,8m de long et de 13,5m de large. Sur quoi on pose une couverture de peaux de béliers teinte en rouge — là c’est du cuir —, et encore par-dessus une couverture en peaux de TaH.aSh, on ne sait pas très bien ce que c’est. Certains traduisent par dauphin, ou par phoque… mais on voit difficilement où trouver ces animaux maritimes en plein désert. En tout cas, c’est une seconde couverture de cuir, sans doute tannée de façon particulière de manière à devenir miroitantes, donnant une texture capable de jouer avec la couleur du ciel et le soleil, quelque chose évoquant à nouveau la rencontre de l’infini avec le fini. La traduction grecque, mais aussi de Flavius Josèphe, parle ici d’une peau de couleur bleu jacinthe, ce qui rejoint assez bien cette idée.

Bref. Tout cela est posé sur une charpente en bois de ShiTTîM, toujours ce fameux bois d’acacia… alors là aussi, trouver suffisamment d’acacia dans le désert dont tirer 56 planches de 4m50 de long sur 70cm d’épaisseur reposant sur des socles d’argent, sans compter les 15 traverses enfilées dans des anneaux pour les arrimer aux planches, le tout couvert de feuilles d’or… il faut déjà le vouloir !!! Ça fait déjà un bon sanctuaire, sans oublier que tout ça est censé être transportable alors même qu’on estime le poids de tout ce bois à environ 54 tonnes ! Alors ne tirons pas de conclusion trop hâtive, mais c’est vrai qu’à tout le moins, c’est assez impressionnant ! Pour ne rien dire du prix de l’ensemble dont des rabbins ont calculé qu’il avoisinerait les 5 milliards de shekels, c’est-à-dire environ 1 milliard d’euros… Eh oui : rien n’est trop beau pour HaShèM ! Et puis pourquoi pas ? Il est tout de même étonnant de voir ce que nos anciens ont su bâtir dans l’Antiquité, alors même que ces œuvres nous semblent surdimensionnées et le fruit d’efforts fantastiques où les hommes se sont surpassés pour leurs dieux. Alors dans le fond, que le peuple élu mette tout en œuvre pour édifier une Demeure digne de ce nom pour le Dieu Libérateur, n’est pas complètement inconcevable.

Reste l’aménagement intérieur, avec un voile, le PaRoKhèT, fait de lin cette fois, mais toujours avec les mêmes couleurs : azur, pourpre et écarlate, brodé de KéROuBîM par les meilleurs artistes. Ce voile délimite, à l’intérieur du Sanctuaire, l’espace du Saint des Saints dans lequel sera déposée l’Arche, alors que de l’autre côté, on posera la MeNoRaH, au Sud, et la table des Pains de la Face, au Nord. Et enfin un rideau de facture semblable au voile, sans les KéROuBîM cette fois, pour marquer l’entrée du Sanctuaire.

Voilà donc pour toute cette partie couvrant la fin du ch. 25 et le ch. 26 du livre de l’Exode dont je vous souhaite une lecture attentive ! Nous verrons la suite la prochaine fois.

Je vous remercie.
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